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FRAIS ET DÉPENS–Répartition–Partie civile. CASSATION–Moyens irrecevables–Défaut d’intérêt–Partie civile–Omission dans la décision attaquée. DOMMAGES-INTÉRÊTS–Détermination de l’indemnité–Pouvoirs des juges du fond –Motifs insuffisants–Non-indemnisation d’un élément du préjudice dont l’inexistence n’est pas constatée. JUGEMENTS ET ARRÊTS–Motifs insuffisants–Dommages–intérêts.

Arrêt n°1220

 

principe

 Si l’article 349, alinéa 4, du Code de procédure pénale prévoit que «la partie civile qui succombe est tenue des dépens », cette disposition concerne uniquement le cas où une décision d’acquittement est intervenue du chef de l’infraction qui avait provoqué la constitution de partie civile.

 

 Lorsque le prévenu a été condamné, la partie civile ne peut se prévaloir, faute d’intérêt, d’une omission dans la décision attaquée qui ne lui fait pas personnellement grief.

 

  Les juges répressifs, s’ils apprécient souverainement les éléments constitutifs du préjudice et la quotité de la réparation à accorder à la partie civile, dans les limites de sa demande, ne peuvent refuser d’indemniser un élément de ce préjudice dès lors qu’ils ne constatent pas son inexistence.

 

En conséquence, lorsqu’une partie civile sollicite la réparation du préjudice matériel et moral subi par sa mère, dont elle est héritière, et du préjudice matériel et moral qu’elle a personnellement éprouvé, les juges du fond ne peuvent, sans priver leur décision de basse légale, se borner à allouer à cette partie civile la somme à laquelle ils évaluent le préjudice moral par elle subi en s’abstenant de s’expliquer sur les autres éléments de préjudice allégués dont ils ne constatent pas l’inexistence.

 

  8 novembre 1962                                                               Dossier nos 10314, 10315 et 10316

La Cour,

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SUR LE DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION, pris de la «violation des articles 347, 348, 349, 352 du dahir formant Code de procédure pénale, de la violation du dahir du 27 septembre 1957 et notamment de son article 13, en ce que le jugement entrepris a totalement omis de statuer sur les dépens de première instance et d’appel, alors que l’article 352 considère comme nul tout jugement dont le dispositif ne contient pas les énonciations prévues par l’article 348, lequel vise expressément la charge des dépens ».

Attendu qu’aux termes de l’article 349 du Code de procédure pénale, tout jugement ou arrêt de condamnation rendu contre le prévenu et contre les civilement responsables de l’infraction, les condamne aux dépens envers le Trésor public .;. que si l’alinéa 4 du même article prévoit que «  la partie civile qui succombe est tenue de dépens », cette disposition concerne uniquement le cas où une décision d’acquittement est intervenue du chef de l’infraction qui avait provoqué la constitution de partie civile .;.

Attendu que Boussedra Kabbour, prévenu, a été pénalement condamné, que dès lors les demandeurs au pourvoi, parties civiles, sont irrecevables, faute d’intérêt, à se prévaloir d’une omission du jugement attaqué qui ne peut leur porter personnellement aucun préjudice.;.

D’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli .;.

SUR LE TROISIÈME MOYEN DE CASSATION, pris de la « violation des articles 347 et 352 du dahir formant Code de procédure pénale, violation du dahir du 27 septembre 1957 et notamment de son article 13, violation des articles 51 et 55 du dahir formant Code pénal, défaut et contradiction de motifs, d éfaut de base légale, violation de la loi, défaut de réponse à conclusions, en ce que le tribunal a déclaré évaluer à 2 500 dirhams le préjudice moral subi par l’exposante, compte tenu du partage de responsabilité et ce, sans autre précision, notamment quant au préjudice moral réparé, et sans faire état du moindre préjudice matériel, alors que  :

1° l’exposante avait présenté une demande tendant à la réparation du préjudice à la fois moral et matériel .;.

2° l’exposante avait fait cette demande tant sur la base du préjudice direct à elle causé, que sur celle des droits qu’elle avait recueillis dans la succession de sa mère .;. et si l’on pouvait à la rigueur lui opposer le partage de responsabilité en tant que venant aux droits de la défunte, on ne pouvait le lui opposer en tant qu’ayant un droit direct .;.

3° s’il est vrai que les juges répressifs apprécient souverainement le montant des dommages–intérêts, c’est dans les limites des conclusions de partie civile et cette appréciation cesse d’être  souveraine lorsqu’elle est déduite de motifs erronés ou contradictoires »  :

Attendu que les dispositions de l’article 55 du Code pénal introduit au Maroc par dahir du 12 août 1913, qui créent une obligation solidaire entre «  individus condamnés … pour un même délit » », exigent pour leur application une pluralité de personnes condamnées, et se trouvent donc inapplicables en l’espèce, puisque Boussedra Kabbour a seul fait l’objet d’une condamnation pénale .;. que si l’article 99 du dahir des obligations et contrats institue une solidarité entre coauteurs d’un fait dommageable, il résulte de l’article 100 du même dahir que cette solidarité n’existe plus lorsque, comme en la cause, il a été possible de déterminer la proportion dans laquelle chacun des coauteurs avait contribué au dommage .;.

Attendu qu’en présence de ce dernier texte, les trois demandeurs au pourvoi, héritiers de leur mère Noémie Ninio décédée des suites de l’accident, ne sauraient se prévaloir d’une obligation in solidum, qu’ils agissent en qualité d’héritiers venant aux droits de la défunte ou qu’ils poursuivent la réparation de leur préjudice personnel par une action indépendante de la succession .;. que d’ailleurs, lorsqu’ils excipent des liens d’affection filiale qui les unissaient à leur mère accidentellement décédée, en vue d’obtenir personnellement la réparation pécuniaire de la douleur morale causée par leur rupture, les enfants ne peuvent corrélativement faire abstraction de ces liens pour s’affranchir des conséquences de la propre faute de la victime et éluder un partage de responsabilité qui se serait imposé à elle si elle avait survécu .;.

Qu’ainsi les demandeurs au pourvoi ne sauraient faire grief au jugement attaqué de leur avoir opposé le partage de responsabilité .;.

Attendu, toutefois, que les juges d’appel se trouvent saisis, par l’effet dévolutif de l’appel de la partie civile, de la demande soumise au premier juge par cette dernière .;. que les juges répressifs, s’ils apprécient souverainement les éléments constitutifs du préjudice et la quotité de la réparation à accorder à la partie civile, dans les limités de sa demande, ne peuvent refuser d’indemniser un élément de ce préjudice dés lors qu’ils n’ont pas constaté son inexistence .;.

Attendu que les demandeurs, parties civiles appelantes, avaient sollicité la réparation du préjudice matériel et moral subi par leur mère, dont ils sont les héritiers, et du préjudice matériel et moral qu’ils ont personnellement éprouvé .;. que le jugement d’appel attaqué à attribuer à chacun des demandeurs 2500 dirhams de dommages-intérêts, somme à laquelle il a évalué le « préjudice moral subi par chacun des trois enfants majeurs de la victime ».

Qu’en s’abstenant ainsi de s’expliquer sur les autres éléments de préjudice allégués, dont ils n’ont pas constaté l’inexistence, les juges d’appel n’ont pas légalement justifié leur décision portant attribution de dommages-intérêts .;.

 

PAR CES MOTIFS

 

Casse et annule, entre les parties au présent pourvoi, le jugement du tribunal de première instance de Casablanca du 1er mars 1962, mais uniquement en ses dispositions relatives à l’indemnisation du préjudice subi par les trois demandeurs.

Président  : M.deltel.-Rapporteur : M. carteret.-Avocat général  :

M. Ruolt.-Avocats : MM chouraqui et serres, poussier, pajanacci, Razon.

رجل قانون:
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